Marion Bonte

Consultante en Parentalité

Dans la vraie vie, il y a toujours des tâches sur un body blanc… Et heureusement !

07 Nov 2022 par Marion

Être parent, entre idéal et réalité

L’idéal parental: le mythe de la perfection

Claire, avec du bois, du matériel Montessori, des petits animaux colorés encadrés aux murs, un tapis moelleux et clair, mon bébé propre avec des vêtements clairs… Telle était la vision d’une chambre de bébé que je m’étais forgée pendant la grossesse en regardant les sites d’achat de vêtements bébés et de matériel de puériculture. 
 
Après l’accouchement : la désillusion. La chambre de notre bébé était parsemée de couches, vêtements sur le tapis blanc, le body blanc lavé mais avec des tâches jaunes, je découvrais alors un nouveau concept bien connu des parents « les tâches propres ».
 
Chaque jour, nous sommes inondés de contenus sur les réseaux, dans les publicités, les médias qui ne représentent pas la réalité des parents.  Cela nous fait osciller entre un sentiment de complète incompétence et une envie de faire quelque chose pour que son enfant rentre dans les cases. A cela s’ajoutent tous les conseils et les recommandations que nous recevons, sollicités ou non.  Sans nous en rendre compte, nous avons tous une représentation mentale de ce à quoi devrait ressembler la parentalité, une sorte d’idéal parental auquel nous essayons de nous conformer. Et quand nous n’y arrivons pas, notre juge intérieur entre en scène : tu n’as pas assez allaité, tu as trop allaité, tu as encore du ventre, tu t’ennuies alors que tu es avec ton bébé tant attendu, tu ne passes pas assez de temps avec tes enfants, tu oublies ta vie de couple, etc. 
 
Pour ma part, après la naissance de mon premier enfant, j’avais en tête les injonctions suivantes : 
1- Il faut retrouver la ligne dans les 6 mois qui suivent ton accouchement. 
2- Ton bébé doit faire ses nuits à 3 mois et dans son lit. 
3- Tu es une mère géniale quand tu allaites ton enfant jusqu’à 6 mois. 
4- Après 6 mois, tu deviens une mère qui a renoncé à sa vie de femme. 
5- Un jeu éducatif c’est mieux, en bois bio c’est encore mieux. 
 
Cet idéal parental m’a amené par exemple à faire des séances de gym avec poussette après avoir dormi 3 heures dans la nuit car j’essayais de ‘faire faire’ ses nuits à mon bébé dans son berceau. Et plus tard, d’exiger qu’une chambre soit rangée, qu’une assiette soient finie ou encore que l’on dise pardon, merci, bonjour quand je l’avais décidé. 

L’écart entre notre idéal et la vraie vie

 
Il existe souvent un décalage entre notre idéal parental et notre réalité, c’est ce décalage qui nous fait souffrir. Nous allons donc essayer de faire des choses pour combler l’écart, des choses qui sont parfois déconnectées de ce qui nous ressentons comme juste, de ce que nous aimerions réellement faire. C’est aussi ce décalage qui va nous pousser à exiger de nos enfants des choses qui sont sans importance, pas de leur âge, de leur intérêt, etc.
 
A cela s’ajoute un sentiment d’urgence, la nécessité d’accélérer les étapes de développement par peur que notre enfant soit en retard par rapport aux autres : on va le stimuler parce qu’il ne marche pas encore, on va tenter des méthodes de dressage au sommeil car il ne fait pas encore ses nuits, on va l’entrainer car il ne sait pas compter jusqu’à 10, on va lui apprendre les lettres pour que ce soit plus facile à l’école, etc.
 
Pendant longtemps j’ai royalement ennuyé mes enfants avec mes jeux éducatifs. Avec comme objectif de stimuler leurs apprentissages, je passais à côté de leurs demandes de jeu, de rire et de connexion avec moi. Puis, je me suis rendue compte qu’un jeu n’avait pas à être dans la catégorie « éducatif » pour permettre à mes enfants d’apprendre mais surtout que jouer sans objectif autre que celui de passer un bon moment ensemble était tout aussi intéressant et bien plus relaxant. 

Se réapproprier sa parentalité

L’objectif que nous avons sur nos enfants, cette projection incessante vers l’avenir nous empêche de vivre le quotidien avec eux, dans le présent et d’aller à leur rythme.
 
M’inscrire dans le présent, faire le tri dans les conseils reçus, écouter davantage mes ressentis et me détacher du regard de l’autre m’a aidé à faire baisser la pression que je me mettais et que je mettais en retour à mes enfants. 
 
Quelques pistes des reflexions lorsque que nous voulons que notre enfant fasse ou ne fasse pas quelque chose ou lorsque que nous nous imposons quelque chose à nous-même :
– D’où me vient cette exigence ?
– Est-ce que cela a réellement de l’importance ?
– Serait-il possible de faire cela autrement ? 
 
Aujourd’hui, mes enfants ne sont plus des bébés, j’ai renoncé aux tapis et aux vêtements clairs. Ils se salissent, remplissent leur chambre de trésors, dorment parfois dans notre lit et jouent à ce qu’ils veulent. J’essaye de contrôler la seule personne que je puisse contrôler, moi-même, et bien évidement, je dois parfois lutter pour faire taire mon juge intérieur ou pour ne pas ressortir du placard mon coffret lecture-écriture Montessori pendant un week-end pluvieux.